7 Janvier 2014
Mi-novembre, j'ai assisté à une conférence qui traitait, entre autres, de la bienveillance. Pas de celle dont il nous arrive à tous de faire preuve, plus ou moins souvent, envers les autres, mais bien de la bienveillance envers soi-même. Au moment de l'inscription, il nous avait été demandé d'apporter un portrait de nous enfant qui serait utilisé au cours d'un exercice. Nous avons posé cette photo devant nous et l'avons longuement contemplée. Ensuite, nous avons fermé les yeux et visualisé l'enfant que nous étions. Nous avons imaginé que nous lui tendions la main, que nous lui parlions doucement. Nous avons apaisé ses craintes, consolé ses chagrins et lui avons dit à quel point nous l'aimions. Nous l'avons considéré dans toute son imperfection avec indulgence et bienveillance. Sans doute la partie la plus difficile, émotionnellement parlant, de l'exercice. Les directives ne l'ont pas précisé, mais, moi, cette enfant que j'ai été, je l'ai serrée dans mes bras et lui ai demandé de m'excuser pour les paroles et les gestes malheureux posés involontairement au cours de ma vie.
Quand j'ai ouvert les yeux et les ai à nouveau posés sur la photo, j'ai été secouée par un choc violent. J'ai réalisé que j'avais
exécuté tout l'exercice en visualisant ma fille. Non que j'en étais absente, mais c'était comme si nous ne faisions qu'une. Je n'avais pas réussi à nous dissocier l'une de l'autre. Dans ce genre
de pratique, il n'est évidemment pas question de réussite ou d'échec. Chacun fait l'exercice en fonction de son expérience de vie, je pense. Cependant, il m'a éclairé sur la façon que nous avons
souvent, adultes, de nous adresser à nos jeunes enfants. Plus particulièrement lorsque ceux-ci expriment une peur, un malêtre, une douleur, un doute... par des pleurs. Ou lorsque leur
comportement sort de notre norme, ne se calque sur nos attentes. Oh, bien sûr, il arrive encore que j'élève la voix plus que de raison, surtout dans les périodes où les nuits sont courtes et
entrecoupées de réveils forcés, mais face à un comportement désarçonnant ou imprévu de ma fille, j'essaie toujours de me poser la question suivante: à son âge, envahie par les mêmes émotions ou
habitée par la même envie, comment aurais-je voulu que les adultes réagissent? Qu'est-ce qui m'aurait consolée, rassurée, amusée, intéressée...? Hurler sur un enfant qui pleure car submergé d'une
peur irrationnelle ou victime d'un accès de timidité inattendu. Lui interdire de faire quelque chose car nos yeux d'adultes blasés n'en voient pas l'utilité ou pire: pour nulle autre raison que
cela "ne se fait pas". Le forcer à vider son assiette alors qu'il n'a tout simplement plus faim. Ridiculiser ses craintes, minimiser sa sensibilité, corriger ses moindres erreurs, rectifier ses
choix que l'on estime mauvais, le presser sans raison. Le gronder car il saute dans les flaques, salit son pantalon, refuse de dire bonjour, plonge les mains dans la peinture, dévalise l'armoire
à bonbons sans permission, touche à tout, change d'avis comme de petite chemise, fait des grimaces, fout le bazar dans sa chambre... sont autant de comportements castrateurs et stériles dont nous
nous rendons tous, à des degré et fréquence divers, coupables. Je ne sous-entends évidemment pas qu'un enfant s'élève sans autorité et limites clairement définies. Il s'agit plutôt, dans certains
cas, d'assouplir ses limites, d'en questionner le bien-fondé, dans d'autres, de faire preuve d'empathie, tout simplement. de dialoguer, expliquer, gentiment, mais fermement pourquoi telle chose
ne se fait pas, pourquoi on est contrarié. Et de ne pas laisser notre stress et nos problèmes d'adultes influer sur nos interactions avec nos enfants. En théorie, ça semble couler de source. Dans
la pratique, bien sûr... Cela dit, je remarque que quand je lâche-prise, que je me pose pour considérer les bêtises pas trop graves ou les angoisses de ma fille avec bienveillance, comme si
c'était moi devant moi les larmes aux yeux ou le sourire coquin aux lèvres, en demande de câlins, en attente de compréhension, les choses se tassent naturellement, plus facilement, sans heurt. Ce
qui, vu le caractère de dragon de la Poule, relève presque du miracle.
Avouez qu'il y a de quoi se méprendre...
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