Les vestes légères ont définitivement réintégré le placard dans lequel elles hiberneront, quelques mois durant, en compagnie des maillots de bain et robes bain de soleil. Ce soleil dont l'intensité et la teinte se sont graduellement altérées. Moins aveuglant, aux accents rougeoyants, accordé aux tonalités de cette saison - qui ose parler de mi-saison? - que je chéris particulièrement. 

Fleur sauvage, beauté farouche, fée des bois aux yeux de biche. Thaïs est née en novembre.

Ses longs cheveux châtains parsemés de fils blonds ondulent autour de ses épaules. Chaque pas de danse les envoie tournoyer dans des sphères inconnues de nous. Enfant sensible sous sa carapace d'humour, de désintérêt affiché et d'un énorme sourire qui souvent endort la méfiance. Quand il ne vous envoie pas ostensiblement promener. Elle est capable d'obéir à vos demandes tout en les contournant juste assez subtilement pour ne pas tomber dans la désobéissance flagrante. Quand elle a un but en tête, ne vous employez pas à tenter de l'en détourner, l'entreprise est vaine. Les yeux posés sur vous, elle ne se contente pas de vous regarder, elle vous sonde. Une faille infime dans votre intonation, une grimace minime sur votre visage, rien ne lui échappe. Et elle ne se gêne pas pour questionner. Opiniâtre, drôle, râleuse, charmante, déroutante aussi quand une soudaine timidité la paralyse aux moments les plus inattendus, lors des événements les plus anodins.

Ma fée des bois aux yeux de biche est d'une nature extrêmement câline et tactile. A presque 9 ans, elle ne s'endort qu'après un rituel remontant à ses plus jeunes années qui a évolué en même temps qu'elle. Et il n'est pas rare qu'elle demande à s'endormir "dans ton lit, maman" ou "avec ton foulard, pour avoir ton odeur."

Etoile insoumise, beauté énigmatique, lutin des sylves aux yeux hypnotiques. Céleste est née en octobre.

Jadis couleur de pluie, ses iris mouvants, toujours ourlés de noir, se parent à présent de nuances d'écorces et de mousse. Ses cils, tels des franges, bordent son regard sans faille, aux paupières qui presque jamais ne clignent. Planter les yeux dans les siens, c'est accepter de se perdre dans un dédale de fougères, dans un sous-bois aux branches basses qui caressent comme elles griffent. Céleste ne vous regarde pas, elle vous enveloppe, elle vous pétrifie. Son visage semble ciselé tant ses traits sont fins et sa peau délicate, lisse, pâle paraît emprunter ses attributs au marbre. Son expression souvent se fige, lèvres serrées, regard fixe. Statuaire, on la croirait ailleurs. En vrai, elle se ressource, réfléchit, observe. Une étincelle, sa bouche s'étire en un large sourire, sa physionomie change du tout au tout et représente soudain la vie-même sous son aspect le plus tumultueux, le plus indomptable.

Mon lutin des sylves a un rire crystallin qui traîne dans son sillage des milliers de particules de poussière d'astres. A trop vouloir les capturer, on commet l'erreur d'oublier de la suivre. Or, elle file, rapide, sautillante, gracieuse... s'arrêter, c'est mourir un peu. Peu encline aux démonstrations affectives ostentatoires, elle préfère de loin vous surprendre et, sans relever la tête ni cesser son activité, lâcher un laconique "maman? ze t'aime fort". Parfois, même, elle fonce sur vous et tout en vous fracassant le nez, vous plante sur la bouche le plus envoûtant des bisous.

Demain, elle aura deux ans. Elle l'a compris. Elle attend.

Thaïs porte un anorak tricolore, un bonnet, un snood et des moufles en tricot.

Céleste porte une parka matelassée, un bonnet à oreilles et un snood et des moufles en tricot.

Le tout nous a été gracieusement offert par Tape-à-l'Oeil!