8 Mars 2018
Comme vous devez être heureuse...
Vous devez être comblée...
Vous devez être épanouie...
Et, à chaque fois, cette envie viscérale de répondre que je ne DOIS rien du tout, que je suis comme je suis, que je fais de mon mieux. Mais qui oserait avouer "Non, à vrai dire, je ne vais pas bien, je lutte minute après minute pour ne pas fondre en larmes..."?
Il existe cette loi universelle qui stipule que quand on devient maman, c'est surtout pour le meilleur et que le pire, mieux vaut le taire.
Cette loi pareille à une main gigantesque qui fait pression sur nos épaules déjà fragilisées.
Cette loi comme une pelle qui creuse chaque jour un peu plus le trou où l'on voudrait s'enterrer, qui gonfle jusqu'à l'explosion la culpabilité que l'on ressent à avoir un petit bébé dans les bras et aller si mal.
C'est une tyrannie du sourire qui commence dès la grossesse.
Enceinte de Thaïs, en fin de parcours, une collègue m'a un jour dit sèchement qu'elle en avait marre de me voir tirer la tronche et traîner la patte alors que je vivais un des plus beaux moments de ma vie et que j'aurais dû être heureuse... Pas le droit d'avoir l'épuisement marqué sur le visage, pas le droit d'avoir du mal à avancer à cause des kilos accumulés et d'un problème de sciatique, juste le droit, voire l'obligation, d'être heureuse.
Feindre l'épanouissement maternel total, nier la dépression qui s'installe, je l'ai fait cette fois encore. Jusqu'à l'éclatement, jusqu'à ce que mon corps ne réponde plus et que le noir des nuits d'hiver s'étende du petit matin au crépuscule sur mes humeurs.
J'ai tout risqué, mon équilibre et celui, encore fragile, trouvé laborieusement par les membres de notre famille. J'ai été jusqu'à me persuader que cette famille que j'ai construite mènerait sans doute une vie meilleure sans moi. Et j'ai eu peur, quand j'ai réalisé dans quelles profondeurs je m'étais laissé tomber, j'ai eu peur de ne plus pouvoir en émerger.
Non, lors d'une naissance, tout n'est pas peint de bleu ou de rose layette.
C'est un bouleversement qui s'enclenche au cours des mois précédents et perdure bien après. Un chamboulement radical qui peut s'avérer fatal.
La dépression post-natale n'est pas rare, les cas sont monnaie courante et, pourtant, aujourd'hui encore, malgré qu'elle soit reconnue par les professionnels de la santé, elle constitue un tabou. Les gens n'aiment pas qu'on écorne leurs images d'Epinal.
Parfois, je me demande... et si je n'avais pas osé crier à l'aide?
A savoir: toutes les maternités proposent un suivi psychologique aux jeunes mamans. Des psychologues sont spécialement attachés à ce service. Ils passent en général dans les chambres pour discuter et proposer une aide éventuelle. N'hésitez pas à les appeler même lorsque vous êtes sorties de l'hôpital, ils seront à même de vous épauler, de vous guider pour mettre en place des relais.
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