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Café, lecture et déception

Café, lecture et déception

Des lustres. Il y a des lustres que je n'ai plus évoqué en ce lieu mon opinion sur mes dernières lectures. Voici qui va y remédier: un compte-rendu d'un des deux bouquins lus pendant les vacances de Noël. En finalité, ce fut un coup de coeur et un coup de gueule.

Comme j'aime les histoires qui se terminent bien, je commence par ma grosse déception du début d'année: Les gens heureux lisent et boivent du café, d'Agnès Martin-Lugand. Je vous parlerai de mon coup de coeur dans un prochain billet.

Impossible d'échapper à ce bouquin qui a fait le tour du net. J'ai fini par craquer sur une jolie version collector, me disant que son succès était sans doute synonyme de qualité. Ce fut une erreur. Le résumé, pourtant, me laissait présager une lecture intense, tout à mon goût... (oui, parfois, j'aime me faire mal)

Diane a brusquement perdu son mari et sa fille dans un accident de voiture. Dès lors, tout se fige en elle, à l’exception de son coeur, qui continue de battre. Obstinément. Douloureusement. Inutilement. Égarée dans les limbes du souvenir, elle ne retrouve plus le chemin de l’existence. Afin d’échapper à son entourage qui l’enjoint à reprendre pied, elle décide de s’exiler en Irlande, seule.
Mais, à fuir avec acharnement la vie, elle finit par vous rattraper…

Ayant un véritable coeur d'artichaut qui me pousse même à éviter de poser les yeux sur les dépouilles de chats, renards et autres animaux gisant sur le bord de la route sous peine de lâcher de larmes irrépressible, à la lecture du résumé, je m'attendais à devoir appréhender ce bouquin armée d'une réserve conséquente de mouchoirs en papier.

Il n'en fut rien.

Après une introduction bien écrite, mais assez pauvre en émotion, on plonge dans le vif du sujet, l'aventure en Irlande, en même temps que dans un bain de clichés et lieux communs assez effarants. On y retrouve tout ce qui fait la recette d'une mauvaise série B. Les personnages, et même la description des lieux, sont caricaturés à l'extrême et manquent de cette once de subtilité qui les rendrait réalistes et donc attachants.

On a le couple de petits vieux gentils et accueillants, un brin curieux et mêle-tout, qui ont le coeur sur la main et sont bourrés de bonnes intentions. Ils vivent à l'irlandaise, dans leur cottage typiquement irlandais à la décoration 100% irlandaise, mangent, boivent et s'habillent irlandais. Bref, un vrai dépliant touristique.

Evidemment, ces bonnes gens ont un fils qui est tout le contraire de l'image d'Epinal de ses parents. Bourru, roux (ben ouais, il est irlandais!), grand, musclé, impoli, aventurier, il a un grand chien et roule en 4x4. L'autre image de l'Irlandais. Avant d'atterrir dans ce roman, il a dû faire ses classes chez Barbara Cartland et quelques-uns de ses collègues chez Harlequin. Bref, son personnage frise le ridicule. A chacune de ses apparitions, je me suis amusée à imaginer la suite de l'action. Pas difficile, comme jeu...

Autre chose qui frise le ridicule, ce sont les réactions de l'héroïne face à ce rustre bellâtre. Elle, pourtant décrite comme quelqu'un ayant gardé une certaine fierté malgré les épreuves endurées, se transforme en espèce de chihuahua hystérique au raisonnement totalement éloigné de toute logique terrestre lors de ses interaction avec le bel Edward. Elle le déteste, oui, mais à la façon d'une gamine pré-pubère colérique et irrationnelle qui, d'affrontement en prise de bec, découvre que sa haine, en fait, n'est autre qu'une forte attirance. Ben oui, évidemment. Malgré les humiliations en série qu'il lui fait subir, chien chien pardonne et revient toujours.

Vous vous souvenez de ce petit garçon en maternelle qui vous ennuyait tout le temps? C'est un peu la même logique transposée à une relation d'adultes. Sauf que, du haut de vos quelques printemps, je suis sûre que vous avez réagi en faisant preuve d'un peu plus d'estime de vous que notre Diane qui, à force de ramper, finira par devoir faire rapiécer tous ses vêtements.

Ils partageront bien sûr une histoire, impossible à prendre au sérieux tant tout est poussé à l'extrême et baigne dans une soupe de clichés aux épices romanesco-gerbatives, qui se terminera d'une façon qui m'a fait penser "tout ça pour ça?" 

A part ces personnages principaux, on a également droit à la soeur du rustre, délurée, hyper mega sympa qui traite d'emblée la nouvelle venue comme sa meilleure amie. Elle boit comme un trou (ben ouais, elle est irlandaise) et grâce à elle, l'héroïne va comprendre que le comportement imbuvable d'Edward cache en réalité un coeur tout mou, n'ayant jamais réussi à cicatriser du mal qui lui a été infligé. Oooooh! On ne s'en doutait pas du tout, tiens.

Et qui c'est qui a fait saigner le coeur du pauvre ours mal léché? Une très très affreuse bonne-femme, une autre caricature dans toute sa splendeur. Celle de la tentaculaire et venimeuse séductrice qui pue le vice et le mensonge à des lieues à la ronde, qui fait exploser les crucifix sur son passage, qui traîne dans son sillage une odeur de souffre et de malheur, celle qui... arrive malgré tout à immiscer le doute dans l'esprit pourtant hermétique de notre irlandais. Bourru et con, donc, cet Edward.

Enfin, last but not least, le meilleur ami homosexuel. Il est parfait dans ses atours de stéréotype du genre très, mais vraiment très, primaire. Beau comme un dieu, insolant, il porte une veste en cuir, what else?, et mène une vie dissolue ponctuée de sorties alcoolisées et d'histoires de coucheries sans lendemain. Ben ouais, puisqu'on vous dit qu'il est homosexuel! A se demander si l'auteure a des affinités avec les théories des adeptes de la Manif pour Tous. Mis à part cela, comme on s'y attend de la part de tout bon homosexuel digne de son rang, il est à la fois l'ange gardien, le doudou et le frère que l'héroïne n'a jamais eu. Les personnes concernées apprécieront.

En ce qui concerne le sujet du double deuil, il est traité avec tellement de légèreté qu'on a tendance à vite l'oublier en cours de lecture. Il ne sert, en fin de compte, que de prélude et de prétexte à une aventure sans grande envergure. Dommage. Il aurait mérité qu'on s'y attarde un peu plus et qu'on le traite avec plus de respect.

En résumé, mais dois-je vraiment résumer?, je me suis laissé avoir par la tendance littéraire et je le regrette. Mes critiques assez vives ne sont que l'expression de ma déception et de mon incompréhension totales face à l'engouement suscité par ce bouquin dans divers milieux. Cela me conforte dans l'idée que tendance n'est pas forcément synonyme de qualité. Il existe tant d'auteurs talentueux à qui le succès tourne le dos parce qu'ils n'appartiennent pas aux bons cercles, ne fréquentent pas les bonnes personnes et ne jouissent pas d'une aura qualifiée de "tendance". Le milieu littéraire souffre, hélas, des mêmes travers que celui de la blogosphère que je connais bien.

N'hésitez pas à me faire part de votre avis, que vous l'ayez apprécié ou pas. Et si vous ne l'avez pas lu, mais que ma critique vous incite à le faire, sachez que je me sépare de mon exemplaire...

Belle journée!

 

 

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Alix


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A
beau blog. un plaisir de venir flâner sur vos pages. une belle découverte et un enchantement. au plaisir
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